Toutes les dernières fois est une très belle saga familiale comme on les aime. Le parcours de vie des personnages s’annonce cependant difficultueux…

Editions France Loisirs | Juillet 2019
320 pages
∇ Pour la famille Cheylard, rien n’est plus fort que les liens du sang. A Ruoms, en Ardèche méridionale, Madgalena et Damian emploient dans leur entreprise de construction et de rénovation leur trois fils, César, Martin et Bastian, et la petite dernière, Elena, une femme libre et indomptable. A la bastide, chacun vit en toute indépendance mais jamais très loin des autres.
Sous la chaleur brûlante de l’été qui s’amorce, alors que la récolte des pêches va commencer, l’arrivée d’un saisonnier espagnol bouleverse ce bel équilibre et provoque une véritable onde de choc au sein de la famille. Les enfants s’interrogent, Bastian surtout, tant sa ressemblance avec l’Espagnol est frappante. Qui est ce mystérieux inconnu et qu’est-il vraiment venu faire à Ruoms ? Soutenu par Elena, il finit par demander des explications à sa mère mais celle-ci s’enferme dans le silence.
Prise au piège, Magdalena comprend qu’elle ne pourra plus taire bien longtemps le secret qu’elle a enfoui en elle durant quarante-deux ans. Ces bouleversements intérieurs auront-ils raison de la belle entente qui régnait jusqu’alors dans le clan Cheylard ? ∇
Dans cette histoire, nous suivons le quotidien de Magdalena et Damian Cheylard, entourés de leurs quatre enfants. Sous le soleil d’Ardèche, ils habitent tous ensemble dans une grande maison de campagne, proches les uns des autres, chacun ayant une dépendance. Ensemble, ils passent des jours agréables entre repas de famille et travail dans l’entreprise familiale qu’ils gèrent tous collectivement. Ils semblent être heureux et unis ; c’est beau de voir une famille aussi soudée. Jusqu’à ce qu’ils soient rattrapés par le passé : un secret de famille, lourd de conséquence. Leur harmonie va voler en éclats lorsque des non-dits datant de l’époque franquiste vont refaire surface. Une histoire qui ne laisse pas indifférent tant des vies ont été bouleversées par ces faits historiques.
Carole Duplessy-Rousée nous fait entrer dans l’intimité d’une famille en apparence banale. Les personnages sont attachants, chacun à sa manière, quoique, quelque fois peut-être un peu clichés. Elena est une jeune femme ouverte, libre et très indépendante. Elle n’hésite pas à dire ce qu’elle pense. Elle est prête à tout pour le bonheur de ceux qu’elle aime. Elle est à l’écoute et trouve des solutions sans jugements. Elle m’a beaucoup plu, mais j’aurai aimé qu’elle applique ses propres conseils à sa vie personnelle. A contrario, j’ai eu beaucoup plus de mal avec sa mère, Magdalena, qui m’a très vite déçue sur plusieurs points. Je l’ai trouvé très égoïste et manipulatrice. Mais, c’est pourtant bien sa personnalité qui booste l’histoire. Autour de ses deux personnages féminins gravitent les hommes, notamment les frères d’Elena, qui n’auraient dû accepter de demeurer auprès de leurs parents. Le domaine ayant été pensés et construit pour eux, Magdalena, a tout géré subtilement, et influé sur les décisions de vie de chacun. En « veillant » sur sa famille, elle a dirigé leur existence principalement en fonction d’elle. D’ailleurs, toutes les difficultés partent de là.
J’ai beaucoup apprécié la plume de cette auteure. C’est très agréable à lire. L’écriture nous plonge à travers l’Histoire, celle sombre de l’Espagne franquiste, et des vols de bébés commis durant cette période. J’ai trouvé que cela a été très bien inséré au récit, et cela m’a attristée d’apprendre ce pan de l’Histoire dont je n’avais connaissance. On découvre également la région ardéchoise, qui vit au rythme des saisons touristiques. Tellement de détails sont transcrits, qu’on entend presque les cigales chanter et l’on sent l’odeur de la lavande. On s’y croirait et cela donne envie de s’y rendre… Surtout en cette période de confinement, où il serait bon d’être dans un si joli paysage !
« Il était là, près d’elle, rien d’autre ne comptait. Cet instant partagé était plus fort que tout. Elle laissa son regard s’égarer sur la rivière qui coulait en contrebas. Les canoës paraissaient minuscules comme des jouets. Ils restèrent ainsi un long moment sans bouger, admirant le soleil qui descendait devant eux. L’astre rougissant comme s’il allait s’embraser. C’était magnifique. Émue par le spectacle, Elena ne put contenir ses larmes. Bastian mit un bras autour de ses épaules et elle posa sa tête contre lui. Heureuse. »
En résumé, entre histoires de cœur et relations familiales complexes, Toutes les dernières fois, est un roman remplit de rebondissements. Les personnages semblent être ce qu’il y a de plus ordinaires, pourtant ils leur arrivent des choses invraisemblables. Je conclurais sur une petite touche négative concernant le dénouement qui me paraît bâclé, même si il peut être touchant et triste. J’aurai souhaité quelques pages en plus, une conclusion plus explicite ; je reste un peu sur ma faim. En tout cas, je suis ravie d’avoir découvert Carole Duplessy-Rousée, et je vais jeter un œil à ses précédents romans. Bonne lecture !